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Le magazine: « les sorcières, Histoire d’une renaissance »

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La figure de la sorcière est changeante ces dernières décennies entre la femme puissante et glamour véhiculée par les émissions télé Charmed ou Vampire Diaries, et celle de bons conseils que l’on retrouve sur Youtube et qui dispense ses recommandations en matière de potions, grimoire et autres astuces witchy. Mais surtout, elle s’ancre dans une mouvance de réappropriation de l’essence féminine, non plus victime d’un patriarcat destructeur, mais en adéquation avec le monde qui l’entoure. La sorcière s’allie à la modernité tout en revendiquant une proximité foncièrement spontanée avec la nature.

Les sorcières histoire d'une renaissance le Point

Le Point a réussi à rendre compte d’une évolution historique sans pour autant tomber dans des clichés surannés d’hommes et de femmes farfelus. Les grandes figures sont évoquées et détaillées à l’image de Médée, Circé, Viviane, Mélusine, Jeanne d’Arc, etc.

Les sorcières histoire d'une renaissance le PointJ’ai beaucoup apprécié la manière dont est analysé le traitement de la sorcière durant le Moyen-Âge car le lecteur prend toute la mesure de la complexité du problème. Il n’est pas que religieux, genré, scientifique ou politique, il est les quatre à la fois. Il est l’illustration d’une société qui mute et qui pose ses jalons sur des piliers glissants.

 

La littérature au secours des sorcières après les avoir diabolisées

On remarque également à quel point la littérature a été libérateur pour les femmes. Par exemple, l’ouvrage de Jean Wier dans son livre « Histoires, disputes et discours des illusions et impostures des diables, des magiciens infâmes, sorcières et empoisonneurs… » publié pour la première fois en 1563 explique que la sorcière souffre de troubles mentaux. Il fait sortir le problème du carcan religieux en le médicalisant.

L’imaginaire collectif fixe également, à travers notamment les contes des frères Grimm « Les contes de l’enfance et du foyer », l’idée de la méchante sorcière, celle qui, de base exogène à la famille, ne servira qu’à détruire les enfants. Cette vision est intéressante dans la mesure où à l’origine c’est la mère biologique dans Blanche-Neige ou Hansel et Gretel qui veut la perte de ses enfants. Afin de servir la famille nucléaire, les frères Grimm font intervenir la belle-mère.

L’historien Jules Michelet sort complètement du prisme de la sorcière diabolique, laide et cruelle. Il va affirmer la nature libre, puissante de la sorcière, victime d’un machisme perpétuel notamment dans son livre « La sorcière » paru en 1862, au détriment de sa carrière puisqu’il perdra sa chaire au Collège de France pour ses positions anticléricales.

Les sorcières contemporaines, des femmes atypiques aux combats modernes

A partir de 1968, un courant anti-conformiste s’est saisi de la figure de la sorcière pour revendiquer la femme libre, puissante, politisée et savante. Des slogans célèbres s’élèvent : « Nous sommes les petites-filles des sorcières que vous n’avez pas réussi à brûler » ou ceux des italiennes : « tremate, tremate, le streghe son tornate », qui se traduit par « tremblez, tremblez, les sorcières sont revenues ».

Ce qui m’a intéressée n’est pas vraiment le côté mystique de ce retour en gloire mais plutôt son inscription matérielle dans un champ politique et social assez discipliné. Il sera l’occasion de mettre en avant des enjeux internationaux comme l’écologie notamment à travers le mouvement néopaïen Wicca. Certes, la sorcière conserve une identité propre liée à un champ homogène comme les références aux potions ou une ambiance d’un autre-temps, mais elle s’inscrit avec force dans des mouvements modernes. Elle n’est plus la paria, elle est celle qui met en exergue des problèmes de fond.

En résumé, ce magazine donne du relief à l’image de la sorcière en dressant un tour d’horizon historique dense nous menant jusqu’à aujourd’hui et à de nouvelles luttes sans flirter avec des fonds communs stéréotypés.

 

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